Vieille de plus de 7 000 ans, la plus ancienne représentation indiquant que le miel était déjà recherché par l’homme se trouve sur la paroi d’une grotte près de Valence, en Espagne : une femme, environnée d’abeilles, récolte du miel sauvage. Plus près de nous, vers 3000 ans avant notre ère, des bas-reliefs égyptiens et des tablettes sumériennes nous apprennent, quant à eux, son usage en pharmacopée.
En fait, ce sont ses grandes qualités, telles sa quasi-imputrescibilité et sa pureté – il est immédiatement comestible et obtenu sans verser le sang –, qui en font une panacée presque universelle et un aliment à très forte charge symbolique. C’est ainsi qu’en Terre promise, c’est-à-dire au paradis, coulent le lait et le miel, sources de toutes les félicités…
Car le miel est un nectar, celui des fleurs. Un nectar simplement transporté par les abeilles qui le stockent dans les rayons de leurs ruches après en avoir prélevé une légère taxe… pour s’alimenter. Aussi, pendant longtemps, tout autour du bassin méditerranéen, il est le seul ingrédient édulcorant. Le sucre, introduit en Occident par les Arabes qui se fournissent en Perse, reste un grand produit de luxe.
Car les tentatives pour cultiver la canne à sucre en Sicile se sont avérées peu convaincantes et insuffisantes, en quantités, aux Canaries. Il faut attendre la fin du XVème siècle pour trouver un terrain propice… aux Caraïbes. C’est alors que le prix du sucre baisse et qu’avec lui, le statut du miel change, passant d’édulcorant à celui d’ingrédient aromatique.
Quant aux plaisirs du goût, ce n’est peut-être qu’au cours de la Renaissance que l’on s’intéresse aux arômes si variés du miel qui retrouve alors un caractère moins utilitaire. N’oublions pas qu’il a longtemps été considéré comme l’ingrédient de base de la nourriture des dieux. Ainsi, le nectar des fleurs étant le support de leur parfum, la nature même du miel permet d’apporter sur notre table les subtiles senteurs de leurs différentes variétés et espèces, de l’eucalyptus aux fleurs montagnardes printanières ou du tilleul estival à l’arbousier du maquis… Et ce en toutes saisons, le pouvoir de conservation du miel abolissant celles-ci en quelque sorte. D’ailleurs, ce sont ces vertus qui font que cuisiniers et pâtissiers s’intéressent à lui aujourd’hui, prenant en compte non seulement le type de plante dont il est issu, mais aussi le terroir d’où il provient.
Article issu du magazine Desserts n°17 – Benedict Beaugé